Médicaments : l’UFC-Que Choisir alerte sur une réforme qui pourrait laisser des millions de patients dans le flou

La notice papier dans les boîtes de médicaments pourrait bientôt disparaître, remplacée par une version numérique accessible via un QR Code. Présentée comme une modernisation du système de santé, cette réforme soulève une inquiétude croissante chez les associations de consommateurs, à commencer par l’UFC-Que Choisir. En ligne de mire : le risque d’exclusion pour une large partie de la population, encore éloignée des outils numériques.

Par Eve
fin notices papier médicament 2025
© iStock

Un projet européen qui bouleverse les habitudes

La réforme s’inscrit dans le cadre de la révision du "paquet pharmaceutique" européen, visant à moderniser l’information des patients et à réduire l’impact écologique de l’industrie pharmaceutique. L’objectif est double : réduire la consommation de papier et améliorer l’accès à une information actualisée, en supprimant les notices papier au profit de leur version électronique, consultable via un smartphone.

En France, une expérimentation est prévue dès l’automne 2025 sur une centaine de médicaments. Ce test, s’il s’avère concluant, pourrait ouvrir la voie à une généralisation de cette démarche dans toute l’Union européenne.

Mais derrière cette ambition, les craintes des usagers sont bien réelles.

Une fracture numérique qui inquiète les associations

Dans une lettre adressée au gouvernement, l’UFC-Que Choisir, aux côtés de Familles rurales et de la CLCV, a demandé le maintien systématique de la notice papier dans toutes les boîtes de médicaments. Leur message est clair : le numérique ne peut pas remplacer un support aussi fondamental, notamment pour les publics les plus fragiles.

Selon ces associations, la suppression de la notice papier risque de pénaliser :

  • Les personnes âgées, moins à l’aise avec les technologies
  • Les foyers en situation de précarité numérique, sans équipement adéquat
  • Les habitants de zones rurales, mal desservis en réseau mobile ou internet

La notice papier est perçue comme un outil simple, direct et fiable, qui ne dépend ni d’un smartphone, ni d’un accès à internet, ni d’une application dédiée. Elle permet aussi de vérifier immédiatement la posologie, les effets secondaires et les interactions, sans devoir scanner un code ou naviguer sur une plateforme.

Voici un aperçu des principales oppositions à la réforme :

Arguments contre la suppression Risques identifiés
Fracture numérique persistante Exclusion des personnes âgées ou vulnérables
Perte d’autonomie pour les patients Difficultés d’accès aux informations de santé
QR Code non utilisable sans réseau Dépendance à un outil technologique
Confidentialité non garantie Risque de traçabilité des traitements via le numérique
Risques en cas de panne, batterie vide, perte du téléphone Accès à la notice rendu impossible

Les arguments des industriels et des institutions

Face aux critiques, les industriels du médicament défendent une évolution nécessaire. Selon les fédérations européennes du secteur (Efpia, Medicines for Europe, AESGP), la notice électronique présente plusieurs atouts majeurs :

  • Mise à jour en temps réel, contrairement au papier
  • Possibilité d’élargir la taille des caractères, utile pour les malvoyants
  • Conditionnements multilingues, facilitant la circulation des médicaments en Europe
  • Réduction des coûts logistiques et des déchets

Selon eux, la transition numérique permettrait aussi de mieux gérer les pénuries de médicaments, en facilitant la redistribution des stocks entre pays grâce à un emballage commun.

Mais ces avancées ne suffisent pas à rassurer les associations.

Une modernisation à double tranchant

Loin de rejeter en bloc le progrès technologique, l’UFC-Que Choisir appelle plutôt à une modernisation inclusive. Elle rappelle que la transition écologique ne doit pas se faire au détriment de l’accès aux soins. Pour elle, le numérique ne peut être qu’un complément, jamais un substitut imposé.

Le danger, soulignent les associations, serait de créer une inégalité d’accès à l’information médicale dans un contexte déjà tendu : vieillissement de la population, tensions sur les services de santé, précarité numérique persistante… À l’heure où la santé publique repose de plus en plus sur l’autonomie des patients, il est essentiel que chacun puisse lire, comprendre et utiliser correctement ses traitements.

Une vigilance citoyenne à maintenir

À travers cette mobilisation, l’UFC-Que Choisir et ses partenaires rappellent l’importance de la voix des usagers dans les décisions de santé. La disparition des notices papier, si elle devait se confirmer, imposerait des garde-fous solides : alternatives gratuites, assistance téléphonique, ou impression à la demande. Mais pour les associations, le plus simple reste de conserver le papier, tant que le numérique n’est pas accessible à tous.

Cette réforme pose une question cruciale : le progrès est-il vraiment tel, s’il laisse une partie des citoyens de côté ?

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