Une refonte qui redistribue les cartes
Aujourd’hui, les abonnés au tarif heures creuses bénéficient de 8 heures de consommation à tarif réduit par jour, généralement situées entre 22h et 6h du matin. Ce système incite à utiliser l’électricité pendant les périodes de faible demande, limitant ainsi la pression sur le réseau aux heures de pointe.
Cependant, la nouvelle répartition des heures creuses prévue dès 2025 pourrait profondément modifier cet équilibre. Les 8 heures de tarif réduit seront maintenues, mais elles ne seront plus exclusivement situées la nuit. Une partie d’entre elles sera déplacée en journée, à des moments où la consommation d’électricité est plus basse, notamment en milieu d’après-midi.
Si l’objectif affiché est de mieux répartir la consommation et d’optimiser l’utilisation des énergies renouvelables, cette modification n’arrange pas tout le monde, en particulier les foyers ayant optimisé leur consommation en fonction des heures creuses actuelles.
Les grands perdants de cette réforme
1. Les propriétaires de véhicules électriques : un coût de recharge qui pourrait grimper
L’un des principaux avantages des heures creuses était la possibilité pour les propriétaires de véhicules électriques (VE) de recharger leur batterie durant la nuit, à moindre coût. Or, avec cette réforme, ces utilisateurs risquent de ne plus avoir assez d’heures creuses nocturnes pour effectuer une recharge complète.
Prenons un exemple concret :
- Une voiture électrique avec une batterie de 50 kWh nécessite 8 heures pour une recharge complète sur une borne domestique standard.
- Si seules 5 ou 6 heures d’heures creuses sont désormais disponibles la nuit, les 2 à 3 heures restantes devront être facturées en heures pleines, à un tarif nettement plus élevé.
Pour ces utilisateurs, cela signifie une hausse de la facture d’électricité, d’autant plus que la plupart n’ont pas la possibilité de recharger leur véhicule en milieu d’après-midi, période où certaines heures creuses pourraient être déplacées.
2. Les foyers équipés de chauffe-eaux programmés sur les heures creuses
De nombreux foyers utilisent un ballon d’eau chaude programmable qui chauffe l’eau uniquement pendant les heures creuses de la nuit, pour réduire les coûts. Avec la réforme, ces appareils risquent de devoir fonctionner pendant des plages horaires moins avantageuses en journée.
Résultat ? Une facture plus élevée pour ces ménages, qui devront :
- Soit accepter de chauffer leur eau en heures pleines et voir leur consommation augmenter.
- Soit investir dans un chauffe-eau plus performant et programmable, ce qui représente un coût supplémentaire.
3. Les travailleurs absents en journée : impossible d’optimiser la consommation
Les personnes qui ne sont pas chez elles en journée ne pourront pas profiter des nouvelles heures creuses déplacées en après-midi. Actuellement, elles programment leurs appareils électroménagers (lave-linge, lave-vaisselle, sèche-linge, etc.) pour fonctionner la nuit.
Avec une réduction des heures creuses nocturnes, elles devront :
- Faire tourner leurs appareils en heures pleines, avec un coût plus élevé.
- Investir dans des batteries domestiques, capables de stocker l’énergie au moment où elle est la moins chère pour la réutiliser ensuite, mais cet équipement reste encore très onéreux.
Une réforme qui pose question
Si le but de cette nouvelle répartition est d’optimiser l’utilisation du réseau électrique et d’intégrer davantage d’énergies renouvelables, certains aspects posent question :
-
Pourquoi ne pas laisser aux abonnés le choix de leurs plages horaires creuses ?
Actuellement, les heures creuses sont définies par les gestionnaires du réseau, sans possibilité d’ajustement personnalisé. Un système plus flexible, laissant les abonnés choisir entre plusieurs options de répartition, serait une alternative plus équitable.
-
Les heures creuses en journée profiteront-elles vraiment aux ménages ?
Déplacer des heures creuses en milieu de journée est censé profiter aux énergies renouvelables, comme le solaire. Mais les consommateurs auront-ils réellement la possibilité de les exploiter ? Beaucoup de personnes sont absentes à ces heures-là, rendant ce système peu adapté à leur quotidien.
-
Une réforme sous-estimée dans son impact ?
Pour les ménages modestes, qui ont fait de réelles économies grâce à un usage optimisé des heures creuses, cette réforme pourrait annuler une partie des gains obtenus. L’impact sur la facture d’électricité sera inégalitaire, favorisant certains profils (comme les retraités à domicile) et pénalisant d’autres (actifs, propriétaires de VE).
Que peut-on faire pour limiter l’impact de cette réforme ?
- Investir dans des systèmes de gestion intelligente de l’énergie, comme des batteries domestiques ou des thermostats connectés.
- Se renseigner sur les nouvelles plages horaires dès leur mise en place, pour adapter au mieux sa consommation.
- Militer pour plus de flexibilité, afin que les abonnés puissent choisir les heures creuses les plus adaptées à leur mode de vie.
Un changement qui ne convient pas à tous
La refonte des heures creuses vise une meilleure gestion du réseau électrique, mais elle pose un vrai problème d’équité entre les consommateurs. Ceux qui avaient adopté des habitudes précises pour maximiser leurs économies risquent d’être pénalisés, notamment les propriétaires de véhicules électriques et les foyers dépendant des chauffe-eaux programmés.
Ce changement pourrait à terme remettre en question l’intérêt même du tarif heures creuses, incitant certains consommateurs à reconsidérer leur abonnement. Faut-il repenser complètement le modèle de tarification de l’électricité ? Une question qui mériterait d’être posée face aux enjeux énergétiques actuels.